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Sep 15, 2014
Puisque nous sommes plongés jusqu'aux tifs dans la rédaction, c'est le moment idéal pour vous parler de notre documentation, matière première essentielle car l'Histoire du manga, ça ne s'invente pas !
Tous nos confrères et certains mangavores connaissent ces deux « classiques » : Manga, 60 ans de bande-dessinée japonaise, de Paul Gravett, et Manga ! Manga ! The World of Japanese Comics par Frederik L.Schodt. Ces deux chercheurs anglophones ont publié les premiers livres bien renseignés et bien ordonnés sur la culture manga, réussissant à synthétiser la majeure partie des courants artistiques des années 50 à 90 ainsi que les évolutions du secteur de l'édition.
Ces bouquins permettent d'obtenir une première vision d'ensemble. Un socle. À partir de là, on peut aller se frotter à des sujets plus spécifiques, qui sont sans doute plus intéressants pour nous parce que leur histoire reste incomplète et fait débat. Exemple ? Le développement du boy's love dans les années 80-90, avant le big-bang des années 2000.
Enfin, nous n'avons pas du tout négligé d'obtenir des données précises sur – entre autres exemples - le développement économique ou la démographie du Japon. Le Ministère des Affaires Étrangères édite d'ailleurs des ouvrages statistiques forts pratiques pour peu qu'on aime les chiffres (donc Laurent pleure à chaque fois qu'il en ouvre un ^^).
En fait, ce sont peut-être des ouvrages n'ayant a priori rien à voir avec le manga qui s'avèrent les plus utiles... Yakuza, la mafia japonaise (Alec Dubro et David Kaplan / éditions Picquier) offre une plongée incroyablement documentée et dépourvue de fantasmes dans ce milieu du crime organisé si spécifique au Japon. Toute son histoire depuis l'ère Edo y est consignée. Effet inattendu : s'y frotter permet de relire le manga Ushijima, l'usurier de l'ombre sous un nouvel éclairage, en ayant tout compris des liens unissant usuriers, criminels, sociétés immobilières et compagnies d'assurances ; ou encore de mieux comprendre les origines culturelles des idées nationalistes qui sous-tendent les mangas des scénaristes Kazuo Koike et Buronson (Crying Freeman, Heat, Strain...).
MATTHIEU :
S’il ne fallait retenir que deux titres en français parmi toute la documentation que j’épluche actuellement, ce serait sans aucun doute ceux-ci.
Le Japon depuis 1945, Jean-Marie Bouissou, éd. Armand Colin
Je vous préviens tout de suite, c’est aussi aride que le désert texan en surface, mais aussi riche en profondeur. La rigueur du plan qui s’intéresse tour à tour aux questions politiques, économiques, sociales et culturelles, décennie après décennie, soutient une densité d’informations impressionnante. On saisit rapidement les tendances étalées sur plusieurs années, avec suffisamment de jalons précisément datés pour nos pages de gauche.
Histoire du manga (Karyn Poupée, éd. Tallandier)
La majeure partie de l’ouvrage de la journaliste de l’AFP (75%) se consacre à la période que nous allons couvrir dans notre livre. Karyn Poupée n’hésite pas à se jouer de la linéarité temporelle pour mieux révéler l’impact qu’ont eu les premiers auteurs, mais respecte cependant des périodes charnière. Coulisses de l’édition, portraits d’auteurs, parallèle avec l’actualité du moment : Histoire du manga est le parfait complément à notre projet. Bien sûr, il n’y a pas d’image, mais son élégante écriture vous guidera sans peine à travers de nombreuses anecdotes que nous n’avons, hélas, la place de relater.
LAURENT :
Japonaises, la révolution douce (Anne Garrigue / éditions Picquier)
Journaliste ayant habité au Japon, l'auteure y décrit les Japonaises d'aujourd'hui et comment elles se sont réinventées loin des rôles que les hommes leur attribuait autrefois, à partir d'études mais avant tout d'une quantité monstrueuse de témoignages. Sentiment amoureux, vie de couple, indépendance financière, vie de famille, évolution professionnelle, activités associatives, créative et militantes, regards sur l'homme... Tous les aspects de cette « révolution douce » sont racontés par des Japonaises et analysés par l'auteure.
Cette enquête fait directement écho aux mangas abordant la vie des femmes sous un angle social et / ou psychologique, tels que In The Clothes Named Fat de Moyoco Anno, les mangas de Q-Ta Minami sur la vie de couple, ceux de Mari Okazaki sur les office ladies ou de Kyoko Okazaki sur la famille japonaise (en décomposition), ou encore tout simplement Nana de Ai Yazawa.
Bref, un décodeur fort utile pour mieux saisir la réalité derrière ces œuvres de fiction !Notoirement connu pour ses erreurs de traduction, de maquette voire de noms d'auteurs, l'imposant pavé a peut-être été injustement méprisé à sa sortie. C'est sûr, il comporte des fails navrants. Mais à sa publication et aujourd'hui encore, c'est l'un des très rares ouvrages grand format et superbement illustré, à présenter autant de mangakas méconnus voire inédits en France. A côté des Naoki Urasawa, Takehiko Inoue et tant d'autres, on trouve quantité d'infos et de planches sur Keiko Takemiya (pionnière du boy's love), Hiroshi Motomiya (auteur du cultissime Salaryman Kintarô), Kotobuki Shiriagari (dessinateur de presse particulièrement connu) et je pourrais vous en citer toute la nuit.
Aujourd'hui, ce livre vaut encore largement le coup d’œil, ne serait-ce que pour ses reproductions de planches en pleine page, une pratique autrefois courante mais qui est quasiment perdue aujourd'hui dans le petit monde du livre sur le manga.
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